Préface

Ce livre contient une série de lettres que j'écrivis pour la »Gazette d'Augsbourg« pendant les années de 1840 à 43. Pour des raisons importantes, je les ai fait paraître il y a quelques mois chez MM. Hoffman et Campe à Hambourg comme un livre à part sous le titre de »Lutèce«, et des motifs non moins essentiels me déterminent aujourd'hui à publier ce recueil aussi en langue française. Voici quels sont ces raisons et ces motifs. Ces lettres ayant paru anonymes dans la »Gazette d'Augsbourg«, et non sans avoir subi de notables suppressions et changements, j'avais à craindre qu'on ne vînt à les éditer après ma mort sous cette forme défectueuse, ou peut-être même en les amalgamant avec des correspondances tout à fait étrangères à ma plume. Pour éviter une pareille mésaventure posthume, j'ai préféré entreprendre moi-même une édition authentique de ces lettres. Mais en sauvant de la sorte, encore de mon vivant, du moins la bonne réputation de mon style, j'avais malheureusement fourni à la malveillance une arme pour attaquer le bon renom de ma pensée: les lacunes linguistiques dans la connaissance de l'idiome allemand, que l'on rencontre parfois chez les Français même les mieux instruits, ont permis à quelques-uns de mes compatriotes de l'un et de l'autre sexe, de faire croire à beaucoup de personnes que, dans mon livre de »Lutèce«, je diffamais tout Paris, et que je rabaissais, par de méchantes plaisanteries, les hommes et les choses les plus respectés en France. Ce fut donc pour moi un besoin moral de faire paraître au plus tôt une version française de mon ouvrage et de donner ainsi à ma très belle et très bonne amie Lutèce le moyen de juger par elle-même comment je l'ai traitée dans le[233] livre auquel j'ai donné son nom. Quand même quelque part, à mon insu, j'aurais pu encourir son mécontentement par une locution un peu rude ou par une remarque malencontreuse, elle ne doit pas m'accuser d'un manque de sympathie, mais seulement d'un manque de culture et de tact. Ma belle Lutèce, n'oublie pas ma nationalité: bien que je sois un des mieux léchés d'entre mes compatriotes, je ne saurais pourtant pas tout à fait renier ma nature; c'est ainsi que les caresses de mes pattes tudesques ont pu te blesser parfois, et je t'ai peut-être lancé plus d'un pavé sur la tête, dans la seule intention de te défendre contre des mouches! Il y a à considérer en outre qu'en ce moment où je suis extraordinairement malade, je n'ai pu vouer ni de grands soins ni une grande sérénité d'esprit à peigner ma phrase; pour dire la vérité, la version allemande de mon livre est bien moins ébouriffée et inculte que la version française. Dans celle-là, le style a partout adouci les aspérités du fond. Il est pénible, très pénible, de se voir forcé d'aller dans une mise si peu convenable présenter ses hommages à une élégante déesse aux bords de la Seine, tandis qu'on a chez soi, dans sa commode allemande, les plus beaux habits et plus d'un gilet magnifiquement brodé.

Non, chère Lutèce, je n'ai jamais voulu te faire injure, et si de méchantes langues s'évertuent à te faire croire le contraire, n'ajoute pas foi à de pareilles calomnies. Ne doute jamais, ô ma toute belle, de la sincérité de ma tendresse, qui est tout à fait désintéressée. Tu es certes encore assez jolie pour n'avoir point à redouter d'être aimée pour d'autres motifs que pour tes beaux yeux.

J'ai mentionné tout à l'heure que les lettres qui composent mon livre de »Lutèce« ont paru anonymes dans la »Gazette d'Augsbourg«. Elles portaient, il est vrai, un chiffre; mais celui-ci n'attestait nullement d'une manière définitive que j'en étais l'auteur. J'ai expliqué cette circonstance en détail dans une note ajoutée à la version allemande de mon livre, et j'en transcris ici le principal passage:

»La rédaction de la ›Gazette d'Augsbourg‹ avait l'habitude[234] de désigner par un chiffre mes articles, aussi bien que ceux des autres collaborateurs anonymes, pour satisfaire à des besoins administratifs, par exemple pour faciliter la comptabilité, mais nullement pour souffler ainsi en demi-confidence, comme le mot d'une charade, le nom de l'auteur à l'oreille de l'honorable public. Or, comme la rédaction seule, et non le véritable auteur, devenait responsable de tout article anonyme, et qu'elle était forcée de représenter le journal non seulement vis-à-vis du public à mille têtes, mais aussi vis-à-vis de bien des autorités sans tête aucune: cette pauvre rédaction, qui avait à lutter contre d'innombrables obstacles tant matériels que moraux, avait bien le droit d'arranger chaque article selon ses besoins du jour, et d'y faire à son gré des suppressions, des retranchements, bref, des changements de toute espèce; il fallait bien lui accorder ce droit, quand même les opinions personnelles et hélas! parfois aussi le style de l'auteur subissaient par ce procédé de graves atteintes. Un publiciste bien avisé doit, pour l'amour même de sa cause, faire bien des concessions amères à la brutale nécessité. Il y a assez de petites feuilles obscures où nous pourrions répandre notre cœur entier avec toutes les flammes de son enthousiasme et de sa colère – mais ces feuilles n'ont qu'un public très restreint et tout à fait impuissant; et écrire dans de tels journaux, vaudrait autant que d'aller pérorer à l'estaminet, devant les habitués du lieu, à l'instar de la plupart de nos grands politiques et grands patriotes. Il vaut mieux modérer notre ardeur et nous prononcer avec une retenue sensée, sinon même sous un déguisement quelconque, dans un journal appelé à bon droit la ›Gazette universelle‹, et dont les feuilles répandues dans tous les pays viennent entre les mains de bien des milliers de lecteurs. Même dans sa mutilation la plus désolante, la parole peut ici exercer une influence salutaire; la plus légère indication devient parfois une semence féconde dans un sol inconnu à nous-mêmes. Si je n'avais pas été animé de cette pensée, je ne me serais jamais infligé l'affreuse torture d'écrire pour la ›Gazette universelle d'Augsbourg‹. Comme je fus de tout temps entièrement convaincu de[235] la fidélité et de la loyauté de ce noble et bien-aimé ami, mon frère d'armes depuis plus de vingt-huit ans, qui dirige la rédaction de la ›Gazette universelle‹, j'ai bien pu supporter de sa part les tourments de ces retouches et de ces accommodements qu'ont subis mes articles; – ne voyais-je pas toujours devant moi les yeux honnêtes de mon ami, qui semblait dire à son camarade blessé: Est-ce que moi, par hasard, je suis couché sur des roses?«

En publiant aujourd'hui sous mon nom ces correspondances que j'avais fait paraître, il y a déjà si longtemps, sans aucune signature, j'ai bien le droit de réclamer à cette occasion le bénéfice d'inventaire, comme on a l'habitude de le faire pour un héritage sujet à caution. J'attends de l'équité du lecteur qu'il veuille prendre en considération les difficultés autant du lieu que du temps, contre lesquelles l'auteur avait à lutter lorsqu'il fit pour la première fois imprimer ces lettres. J'assume toute responsabilité pour la vérité des choses que je disais, mais nullement pour la manière dont elles ont été dites. Celui qui ne s'attache qu'aux mots, trouvera aisément dans mes correspondances, à force de les éplucher, bon nombre de contradictions, de légèretés, et même un manque apparent de conviction sincère. Mais celui qui saisit l'esprit de mes paroles, y reconnaîtra partout la plus stricte unité de pensée et un attachement invariable pour la cause de l'humanité, pour les idées démocratiques de la révolution. Les difficultés locales dont je viens de parler, reposaient dans la censure, et dans une double censure; car celle qu'exerçait la rédaction de la »Gazette d'Augsbourg«, était encore plus gênante que la censure officielle des autorités bavaroises. J'étais souvent forcé de pavoiser l'esquif de ma pensée de banderoles dont les emblèmes n'étaient guère la véritable expression de mes opinions politiques ou sociales. Mais le contrebandier journaliste se souciait peu de la couleur du chiffon qui était pendu au mât de son navire, et avec lequel les vents jouaient leurs jeux volages: je ne pensais qu'à la bonne cargaison que j'avais à bord, et que je désirais introduire dans le port de l'opinion publique. Je puis me vanter d'avoir[236] bien souvent réussi dans ces entreprises, et l'on ne doit pas me chicaner sur les moyens que j'employais parfois pour atteindre le but. Comme je connaissais les traditions de la »Gazette d'Augsbourg«, je n'ignorais pas, par exemple, qu'elle s'était toujours imposé la tâche de porter tous les faits de l'époque, non seulement avec la plus grande promptitude à la connaissance du monde, mais aussi de les enregistrer complètement dans ses feuilles comme dans des archives cosmopolites. Il me fallait donc constamment songer à revêtir de la forme d'un fait tout ce que je voulais insinuer au public, l'événement aussi bien que le jugement que j'en portais, bref, tout ce que je pensais et sentais; et dans ce dessein, je n'hésitais pas à mettre souvent mes propres opinions dans la bouche d'autres personnes, ou même je parabolisais mes idées. Voilà pourquoi mes lettres contiennent beaucoup d'historiettes et d'arabesques, dont le sens symbolique n'est pas intelligible pour tout le monde, et qui ont pu paraître aux yeux du lecteur superficiel comme un ramassis de jaseries mesquines et de notices de gobe-mouches. Dans mes efforts de faire toujours prédominer la forme du fait, il m'importait également de choisir pour mon langage un ton qui me permit de rapporter les choses les plus scabreuses. Le ton le plus avantageux à cet égard était celui de l'indifférence, et je m'en servis sans scrupule. Indirectement il y avait aussi moyen de donner plus d'un avis utile et de faire maint redressement salutaire. Les républicains qui se plaignent d'une absence de bon vouloir de ma part, n'ont pas considéré que pendant vingt ans, dans toutes mes correspondances, je les ai, en cas d'urgence, défendus assez sérieusement, et que, dans mon livre de »Lutèce«, je faisais bien ressortir leur supériorité morale, en mettant continuellement à nu l'outrecuidance ignoble et ridicule et la nullité complète de la bourgeoisie régnante. Ils ont la conception un peu lourde ces braves républicains, dont j'avais d'ailleurs autrefois une meilleure idée Sous le rapport de l'intelligence, je croyais que leur étroitesse d'esprit n'était que de la dissimulation, que la république jouait le rôle d'un Junius Brutus, afin de rendre par cette feinte[237] imbécillité la royauté plus insouciante, plus imprévoyante, et de la faire ainsi tomber un jour dans un piège. Mais après la révolution de Février je reconnus mon erreur, je vis que les républicains étaient réellement de très honnêtes gens qui ne savaient pas dissimuler, et qu'ils étaient en vérité ce dont ils avaient l'air.

Si les républicains offraient déjà au correspondant de la »Gazette d'Augsbourg« un sujet très épineux, il en était ainsi à un bien plus haut degré pour les socialistes, ou, pour nommer le monstre par son vrai nom, les communistes. Et cependant je réussis à aborder ce thème dans la »Gazette d'Augsbourg«. Bien des lettres furent supprimées par la rédaction de la Gazette qui se souvenait du vieux dicton: »II ne faut pas peindre le diable sur le mur.« Mais elle ne pouvait pas étouffer toutes mes communications, et, comme je l'ai dit, je trouvai moyen de traiter, dans ses prudentes colonnes, un sujet dont l'effroyable importance était tout à fait inconnue à cette époque. Je peignis le diable sur le mur de mon journal, ou bien, comme s'exprimait une personne très spirituelle, je lui fis une bonne réclame. Les communistes, répandus isolément dans tous les pays et privés d'une conscience précise de leurs communes tendances, apprirent par la »Gazette d'Augsbourg« qu'ils existaient réellement, ils surent aussi à cette occasion leur nom véritable, qui était tout à fait inconnu à plus d'un de ces pauvres enfants trouvés de la vieille société. Par la »Gazette d'Augsbourg«, les communes dispersées des communistes reçurent des nouvelles authentiques sur les progrès incessants de leur cause; ils apprirent à leur grand étonnement qu'ils n'étaient pas le moins du monde une faible petite communauté, mais le plus fort de tous les partis; que leur jour, il est vrai, n'était pas encore arrivé, mais qu'une attente tranquille n'est pas une perte de temps pour des hommes à qui appartient l'avenir. Cet aveu, que l'avenir appartient aux communistes, je le fis d'un ton d'appréhension et d'angoisse extrêmes, et hélas! ce n'était nullement un masque! En effet, ce n'est qu'avec horreur et effroi que je pense à l'époque où ces[238] sombres iconoclastes parviendront à la domination: de leurs mains calleuses ils briseront sans merci toutes les statues de marbre de la beauté, si chères à mon cœur; ils fracasseront toutes ces babioles et fanfreluches fantastiques de l'art, qu'aimait tant le poète; ils détruiront mes bois de lauriers et y planteront des pommes de terre; les lis qui ne filaient ni ne travaillaient, et qui pourtant étaient vêtus aussi magnifiquement que le roi Salomon dans toute sa splendeur, ils seront arrachés alors du sol de la société, à moins qu'ils ne veuillent prendre en main le fuseau; les roses, ces oisives fiancées des rossignols, auront le même sort; les rossignols, ces chanteurs inutiles, seront chassés, et hélas! mon »Livre des Chants« servira à l'épicier pour en faire des cornets où il versera du café ou du tabac à priser pour les vieilles femmes de l'avenir. Hélas! je prévois tout cela, et je suis saisi d'une indicible tristesse en pensant à la ruine dont le prolétariat vainqueur menace mes vers, qui périront avec tout l'ancien monde romantique. Et pourtant, je l'avoue avec franchise, ce même communisme, si hostile à tous mes intérêts et mes penchants, exerce sur mon âme un charme dont je ne puis me défendre; deux voix s'élèvent en sa faveur dans ma poitrine, deux voix qui ne veulent pas se laisser imposer silence, qui ne sont peut-être au fond que des instigations diaboliques – mais quoi qu'il en soit, j'en suis possédé, et aucun pouvoir d'exorcisme ne saurait les dompter.

Car la première de ces voix est celle de la logique. »Le diable est un logicien!« dit le Dante. Un terrible syllogisme me tient ensorcelé, et si je ne puis réfuter cette prémisse: »que les hommes ont tous le droit de manger«, je suis forcé de me soumettre aussi à toutes ses conséquences. En y songeant, je cours risque de perdre la raison je vois tous les démons de la vérité danser en triomphe autour de moi, et à la fin un désespoir généreux s'empare de mon cœur et je m'écrie: Elle est depuis longtemps jugée, condamnée, cette vieille société. Que justice se fasse! Qu'il soit brisé, ce vieux monde, où l'innocence a péri, où l'égoïsme a prospéré, où l'homme a été exploité par[239] l'homme! Qu'ils soient détruits de fond en comble, ces sépulcres blanchis, où résidaient le mensonge et l'iniquité! Et béni soit l'épicier qui un jour confectionnera avec mes poésies des cornets où il versera du café et du tabac pour les pauvres bonnes vieilles qui, dans notre monde actuel de l'injustice, ont peut-être dû se passer d'un pareil agrément – fiat justitia, pereat mundus!

La seconde des deux voix impérieuses qui m'ensorcèlent est plus puissante et plus infernale encore que la première, car c'est celle de la haine, de la haine que je voue à un parti dont le communisme est le plus terrible antagoniste, et qui est pour cette raison notre ennemi commun. Je parle du parti des soi-disant représentants de la nationalité en Allemagne, de ces faux patriotes dont l'amour pour la patrie ne consiste qu'en une aversion idiote contre l'étranger et les peuples voisins, et qui déversent chaque jour leur fiel, notamment contre la France. Oui, ces débris ou descendants des teutomanes de 1815, qui ont seulement modernisé leur ancien costume de fous ultratudesques, et se sont un peu fait raccourcir les oreilles – je les ai détestés et combattus pendant toute ma vie, et maintenant que l'épée tombe de la main du moribond, je me sens consolé par la conviction que le communisme, qui les trouvera les premiers sur son chemin, leur donnera le coup de grâce; et certainement ce ne sera pas par un coup de massue, non, c'est par un simple coup de pied que le géant les écrasera ainsi qu'on écrase un crapaud. Ce sera son début. Par haine contre les partisans du nationalisme, je pourrais presque me prendre d'amour pour les communistes. Au moins, ce ne sont pas des hypocrites ayant toujours sur les lèvres la religion et le christianisme; les communistes, il est vrai, n'ont pas de religion (aucun homme n'est parfait), les communistes sont même athées (ce qui est assurément un grand péché), mais comme dogme principal ils professent le cosmopolitisme le plus absolu, un amour universel pour tous les peuples, une confraternité égalitaire entre tous les hommes, citoyens libres de ce globe. Ce dogme fondamental est le même qu'a prêché jadis l'Évangile,[240] de sorte qu'en esprit et en vérité les communistes sont bien plus chrétiens que nos soi-disant patriotes germaniques, ces champions bornés d'une nationalité exclusive.

Je parle trop, en tout cas plus que ne me permettent la prudence et le mal de gorge dont je suis affecté dans ce moment. Aussi n'ajouterai-je plus que deux mots pour terminer. Je pense avoir donné des indications suffisantes sur les circonstances défavorables dans lesquelles j'écrivis les lettres de la »Lutèce«. Outre les difficultés locales, j'avais aussi, comme je l'ai dit, à combattre des obstacles temporaires. Quant à ces obstacles que me suscitait le temps où j'écrivis ces lettres, un lecteur intelligent pourra s'en faire facilement une idée; il n'a qu'à regarder la date de mes correspondances, et à se rappeler qu'à cette époque c'était justement le parti national ou soi-disant patriotique qui prédominait en Allemagne. La révolution de Juillet l'avait poussé un peu vers le fond de la scène politique, mais les fanfares belliqueuses de la presse française de 1840 fournirent à ces gallophobes la meilleure occasion de se mettre de nouveau en avant; ils chantèrent alors la chanson du »Rhin libre«. A l'époque de la révolution de Février, ces braillements furent étouffés sous des cris plus raisonnables, mais ceux-ci durent bientôt après se taire à leur tour lorsque arriva la grande réaction européenne. Aujourd'hui les nationalistes et toute la mauvaise queue de 1815 prédominent encore une fois en Allemagne, et ils hurlent avec la permission de monsieur le maire et des autres hautes autorités du pays. Hurlez toujours! le jour viendra où le fatal coup de pied vous écrasera. Dans cette conviction, je puis sans inquiétude quitter ce monde.

Et maintenant, cher lecteur, je t'ai autant que possible mis en état de juger l'unité de pensée et le véritable esprit de ce livre, que je présente avec confiance à tous les hommes de bonne foi.

Paris, le 30 mars 1855

Henri Heine[241]

Quelle:
Heinrich Heine: Werke und Briefe in zehn Bänden. Band 6, Berlin und Weimar 21972, S. 233-242.
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